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Cruella

  • Photo du rédacteur: Candice Metzger
    Candice Metzger
  • 14 juil. 2024
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 18 nov. 2024



On dit que la différence entre un héros et un méchant, est souvent définie par celui qui raconte l’histoire. Que les méchants ne sont pas nés, ils sont ce que le monde a fait d'eux.


Et parfois, c’est juste que vous avez très envie de tuer votre psychopathe de mère. La famille, c’est compliqué. Ce n’est pas Cruella qui nous dira le contraire.


Récompensé par l'Oscar des Meilleurs Costumes, le film Cruella a le mérite de créer la surprise en mettant sous le feu des projecteurs l'une des méchantes les plus connues de l'univers Disney. Que ce soit par son idée du meurtre comme hobby thérapeutique ou par un sens de la mode disons… tranchant, tout droit sorti de l’esprit décalé de Jenny Beavan. Laquelle était déjà connue du cinéma pour son travail sur l'original Mad Max : Fury Road. Pour cette femme qui se définit davantage comme une conteuse d’histoire que comme créatrice de mode, Cruella était sans conteste un défi à sa hauteur.


À votre droite, chers spectateurs, Cruella (anciennement Estella et future d’Enfer) marche sur le Londres des années 70, armée de ses hauts talons et de son rouge à lèvres. Ambiance punk rock et extravagance, le parfum de la rébellion émoustille la capitale. En face d’elle, La Baronne von Hellman. Papesse de la mode, mais un brin vieux jeu, La Baronne règne sur la Haute Couture avec un style soigné et sans le moindre défaut. On ressent l’influence des classiques pour ses silhouettes sculpturales et raffinées. Nos deux rivales sont sur le pied de guerre, prêtes à tout pour gagner le titre de reine de la mode. Et tous les coups sont permis.


Pour confectionner les costumes du film, Jenny Beavan a puisé dans ses souvenirs de jeunesse londonienne des années 1970. Les costumes du film sont un voyage dans le temps, reflet des normes établies face à l'effervescence, cette jeunesse qui aspire à davantage. Le strict des années 50, cette explosion de liberté dans les années 60, jusqu'à son paroxysme dans les années 70. Cette génération en ébullition - bruyante, voyante - prête à bousculer les moeurs, Cruella en est la quintessence. 


Tout en se distançant des précédentes adaptations - le film d’animation ou le live-action dont la célèbre performance de Glenn Close a su terrifier les enfants (au hasard, moi) - Jenny a toutefois fait une exception pour les acolytes de Cruella, Jasper et Horace. Beavan a travaillé avec la designer adjointe, Sheara Abrahams, pour rendre hommage au film original, en s’inspirant des teintes aubergine et olive caractéristiques des personnages.


Pour exprimer le caractère rebelle de Cruella, Jenny pouvait alors compter sur l’exubérance de Vivienne Westwood, la chanteuse punk Nina Hagen et son style unique, ou encore la théâtralité d'Alexander McQueen. Un savant mélange d'audace, de détermination. Et surtout, le désir brûlant d'être vu, reconnu. Admiré.


Et quand on souhaite faire ses premiers pas dans le monde, autant le faire en grandes pompes. Car quoi de pire que d'être invisible ? Je parle bien sûr de la fameuse robe rouge, dévoilée lors du bal Noir & Blanc donné par La Baronne von Hellman. Celle que l'on découvre dans une explosion de flammes, sous le regard émerveillé de tous. La toute première de Cruella. Une robe avec laquelle vient le changement. Et la vengeance.

"La robe en dessous est composée à partir d’une vieille robe de la Baronne, ça fait partie de l’histoire." explique Jenny. "Cruella la trouve dans une friperie, et en un clin d’œil elle la transforme en une robe extraordinaire déconstruite et reconstruite. Elle est inspirée par la robe Tree de Charles James."

Rouge. Couleur de la passion, mais aussi du danger. Une teinte qui a accordée à Cruella toute l'attention dans ce bal noir et blanc. Une entrée osée dans l'univers impitoyable de la mode. Une déclaration lancée au monde mais surtout, à La Baronne : Je suis meilleure, je suis le futur. La mode devient alors une arme et Cruella est déterminée à remporter la guerre.


Une femme avec une veste en cuir

Chaque nouvelle apparition de la styliste devient alors un évènement, un spectacle à part entière. Eclipsant toujours un peu plus La Baronne. Comme le costume de moto, s'illuminant à la lueur des néons, où la texture de la veste en cuir imite celles des pneus. De larges épaules lui donnant un air d'autorité. L'image même de la mauvaise fille mais qui ne perd pas de vue le glamour avec son pantalon à paillettes dorées. Mais pour une fois, c'est davantage sur le maquillage qu'il faudra porter son attention. Du noir pour l'effet dramatique et un seul mot : Future.


Le nom de Cruella est désormais sur toutes les lèvres. La légende se construit dans cet esprit de révolte, où l'élément punk est le plus présent. Véritable mélange d'influences, avec les années 70, le militaire et le fantastique, tout en y ajoutant l'utilisation de vieilles pièces de manière éthique. 


Jenny Beavan précise qu’une photographie de la chanteuse allemande Nina Hagen fut source d’inspiration. "On la voit assise, les jambes croisées ; elle porte un pull pelucheux légèrement oversize et un pantalon souple très ordinaire. Cela m’a donnée l’idée qu’Estella aurait pu fréquenter les boutiques vintage de Brick Lane à Londres, à l’époque où c’était un marché aux puces". L'équipe des costumes s'est alors aventuré sur les marchés aux puces de Portobello Road, à Londres ou encore la foire du vintage A Current Affair à Brooklyn. Si les pièces n'ont pas été retenues, l'idée est toujours bien présente.


Clin d'oeil aux années 70, cette nouvelle tenue est un hommage vibrant à la mode d'époque où

les pièces militaires y étaient très populaires, associées avec un jean ou une jupe à froufrous.

Un travail d’orfèvre pour cette jupe magnifique qui ne comptait pas moins de 5000 pétales cousus à la main par une costumière, Kirsten Fletcher, et une armée d’étudiants venus lui prêter main forte. En y regardant de plus prêt, vous pourrez déceler dans cette robe militaire, quelques secrets qui font de Cruella la véritable reine de la mode. Sur les épaulettes, des mini chevaux et des pièces de carrosse, lui composant un look très royal. Et peut-être auriez-vous déjà remarqué sa coiffure, qui n'est pas sans rappeler une couronne.


Mention spéciale à Kirsten Fletcher, créatrice australienne qui a remporté le World of Wearable Art pour la Nouvelle-Zélande. A qui nous devons également la robe camion benne, une robe volumineuse confectionnée à partir de journaux rapportant la rivalité entre Cruella et la Baronne.


Une rivalité qui atteint son paroxysme avec le premier défilé de la jeune femme. Les mannequins dansent et posent sur le rythme accrocheur de I Wanna Be Your Dog. Guitare, batterie et anti-conformisme, le mouvement punk dans toute sa splendeur.

Et occasion très spéciale dit tenue très spéciale. Hommage au chef d'oeuvre original, Cruella s'avance sur la scène, le menton haut et le regard joueur, vêtue d'un manteau asymétrique avec du similicuir, reconnaissable par son imprimé dalmatien. Mais rassurez-vous, aucun animal n’a été blessé durant le tournage.


Bien sûr, il n'était pas possible de parler de Cruella sans un mot sur son ennemie, la "méchante" du film. La Baronne Von Hellman.

Les deux adversaires s'affrontent sur le terrain de la mode et de la création. Et leur arme favorite semble être leurs propres styles. Alors que la palette de Cruella se concentre autour de couleurs franches - tels noir, blanc, un peu et du rouge pour les moments marquants - La Baronne s'oriente davantage sur des teintes marron et dorées. Cruella s'amuse avec l'anti-conformisme du mouvement punk (cuir, chaîne). Pour La Baronne, un style plus old school, embellis de turbans, taffetas et satins duchesse.



Jennu Beavan explique s'être inspirée d'une esthétique plus vintage avec la maison Dior, les magazines Vogue de l'époque et le style d'Elizabeth Taylor pour habiller le personnage.

"C’est assez influencé par Dior, et elle est assez vieux jeu, donc plutôt années 1950 et 1960. C’est une bonne styliste, mais elle est un peu dépassée, c’est ce qui permet à Cruella de débarquer avec une approche novatrice, plus amusante de la mode. On avait l’envie que la Baronne ait un véritable sens de l’élégance qui transpire dans toutes ses créations." 


Dans leurs styles, on peut toutefois y voir une connexion. Toutes deux retiennent l'attention grâce à

des costumes très théâtraux. La garde-robe de La Baronne se composent avec beaucoup d'asymétrie, presque inspirée de l'architecture. Des formes audacieuses auxquelles on ne s'attend pas, une sensation de mouvement, qui prennent de l'espace et lui permettent de s'imposer. Même ses cheveux qui, lorsqu'elle ne les porte pas en turban, sont coiffés en hauteur pour donner un sentiment d'autorité. Pour Cruella, de longues traînes et de larges épaules. La jeune femme est reconnue pour ses costumes hors du commun, reflets de son énergie créative et sa proportion au chaos.



C'est presque comme si elles incorporeraient les personnalités et le style de l'autre dans leurs costumes. L'asymétrie dans leurs tenues, pourrait être perçu comme un clin d'oeil à l'esthétique désordonnée de Cruella, tandis que les gants qu'elles portent toutes deux se rapprocheraient du style délicat La Baronne. 


Bien sûr, tout combat se solde par un triomphe. Et une défaite.


La fin de La Baronne Von Hellman se signe dans une robe métallisé aux longues manches drapées. Et surtout, ornée d'une pièce argentée sur le devant, ressemblant presque à une armure. Face à la menace qu’est Cruella, le symbolisme d'un besoin de se protéger est d'autant plus fort qu'il s'agit de l'ultime confrontation entre les deux femmes. Mais nous pouvons tous deviner à qui revient la victoire.


Cruella De Vil prend désormais sa place dans Londres. Dernier costume du film, simple mais puissant : un blazer en tweed noir avec des épaulettes pointues et des manches cape. Si le costume est considérablement atténué par rapport à ses autres looks, il n'en reste pas moins audacieux et féroce. 


La Cruelle Diablesse semble avoir de grandes idées pour la suite.

Et nous les attendons avec impatience.


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